Fondation
Émile-Nelligan

Allocution du lauréat du prix Serge-Garant 2006

John Rea

 

Montréal, le 8 novembre 2006.

L’attribution de ce prix aujourd’hui, ce grand honneur qui porte le nom de Serge Garant, me touche plus que vous ne pourriez l’imaginer. Comme tous les lauréats qui m’ont précédé à ce podium, j’ai eu la chance de travailler avec ce polyvalent artiste – compositeur, chef d’orchestre, animateur et professeur. Pour moi, Garant symbolisait surtout la détermination et, si besoin était, la détermination devant les conditions parfois défavorables à la création. Comme un phare, il illuminait les chemins à suivre et, étant un homme absolument intègre, il était un modèle de comportement que j’ai tant admiré. Son attitude créatrice ressemblait à celle décrite jadis par le romancier et penseur, Arthur Koestler (1905-1983) : La créativité est un processus d’apprentissage où le professeur et l’élève se situent dans le même individu.

Je dis « conditions parfois défavorables à la création » parce que la création en musique de concert, il y a de cela presque un demi-siècle, était perçue comme une extravagance inutile et peu nécessaire à l’édification et à la bonne conduite de notre société. Agir en tant que créateur-compositeur présumait un mode de vie sans aucun « interauditeur » (si vous me permettez ce néologisme). Aussi étrange que cela puisse paraître, nous nous retrouvons de nos jours très peu loin de pareilles perceptions, perceptions répandues surtout chez nos diffuseurs, nos grandes institutions musicales ainsi que, paradoxalement, chez nos subventionneurs de culture musicale. La création signifie cependant la liberté et nous savons comment la liberté est mise à rude épreuve en ce moment. La création exige la liberté d’esprit, liberté d’apprendre, liberté de se connaître soi-même et non pas de se juger d’une manière – ou de s’écouter d’une oreille – complaisante. À vrai dire, ce serait à l’imaginaire du créateur-compositeur d’être mis à l’épreuve, une épreuve digne de la liberté.

Le privilège d’être devenu un compositeur – car s’en est un – présume non seulement une collaboration essentielle avec des interprètes dévoués aux esprits ouverts, mais aussi avec des aventureux producteurs de concert. J’ai le bonheur d’être toujours entouré de ces personnes qui me sont très chères, comme en témoignera la prestation fabuleuse de M. Richard Raymond dans quelques instants. Merci sincèrement, Richard. Merci aussi à M. Gilles Tremblay pour la très sympathique présentation de mon parcours personnel. Je voudrais d’ailleurs m’excuser auprès de lui, car lorsqu’il m’a appris que j’étais le lauréat de cette année, je me suis empressé tout nerveux de lui demander s’il y avait une « allocation ». Vous avez évidemment tous compris que, après le texte que je viens de vous lire, je voulais dire « allocution ». Gilles, tu as dû me prendre pour un gros radin ! Pardonne mon français ! Finalement, un énorme merci à tous les membres du jury et au président de celui-ci, M. Jacques Drouin. Mes remerciements les plus sincères aussi à la Fondation Émile-Nelligan.

J’accepte donc le Prix Serge-Garant avec une très grande joie et une très profonde humilité. Merci beaucoup.

Fondation
Émile-Nelligan

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