Fondation
Émile-Nelligan

Allocution du lauréat du prix Ozias-Leduc 1992

Roland Poulin

 

C’est avec une très grande émotion que je reçois ce prix.

Permettez-moi de revenir quelque peu en arrière, plus exactement au début des années soixante. Un ami m’a invité à l’accompagner au Musée des beaux-arts de Montréal. À cette occasion, j’ai été particulièrement frappé par un tableau : « L’Étoile noire » de Paul-Émile Borduas. J’avoue que je n’ai pas compris le tableau car c’est ma première visite dans un musée, ma première véritable rencontre avec l’art plastique et l’art abstrait. Mais face à ce tableau j’ai senti qu’une interrogation ou une inquiétude pouvait prendre la forme d’un objet. En sortant du musée, ma décision est prise, je veux faire de l’art ; je veux créer un objet aussi étonnant que ce tableau, ce qui est plus facile à dire qu’à faire puisque j’y travaille encore.

Il y eu une époque où la sculpture avec d’autres métiers étaient réunis sous le toit de la cathédrale. La cathédrale étant à la fois un lieu physique et spirituel. Plus tard Rodin avait compris que la sculpture était dorénavant abandonnée à elle-même, un objet parmi d’autres objets, parmi les choses du monde qui nous entoure et soumis aux mêmes lois physiques. C’est vrai, mais en même temps la sculpture doit se démarquer, être en quelque sorte intangible, séparée des autres choses. Pour moi, le travail sur la matière est un prétexte, une façon oblique d’aborder une autre réalité plus impalpable, voire métaphysique.

Parler de Borduas c’est aussi, d’une certaine façon, parler d’Ozias Leduc qui a été son maître, son ami, et qui a exercé sur lui une influence considérable. Nous sommes tous les fils ou les filles de quelqu’un. À mon tour je voudrais rendre un hommage à quelqu’un qui est ici aujourd’hui et pour qui j’ai une très grande admiration, madame Chantal Pontbriand qui a fondé la revue pour l’art Parachute. Pour toute une génération, la mienne, Parachute, par son intérêt pour l’art contemporain d’ici, et par son ouverture sur l’art international, a été le lieu, le contexte qui nous a permis de nous épanouir pleinement.

Je suis très sensible à l’hommage que vous me rendez aujourd’hui.

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