Fondation
Émile-Nelligan

Michaël Trahan

Lauréat du prix Émile-Nelligan

Michaël Trahan,
Nœud coulant,
Le Quartanier
2013

 

 

 

 

Michaël Trahan est né en 1984. Il a grandi à Acton Vale, en Montérégie, avant de s’établir à Montréal au début des années deux mille. En 2011, il a complété un mémoire de maîtrise sur la réception de l’œuvre du marquis de Sade dans la France de l’entre-deux-guerres. Ses recherches doctorales portent sur les limites du lisible dans le champ poétique français contemporain. Son premier livre de poèmes, Nœud coulant, est paru à l’hiver 2013 chez Le Quartanier.

Commentaire du jury, par Jean-Simon DesRochers, président.

Il faut remonter à loin pour trouver un premier livre de poèmes si ambitieux et si abouti. C’est avec cent trente-sept poèmes déclinés en dix suites que Michaël Trahan présente une écriture souple, inventive, témoignant d’une vive intelligence. Sans chercher l’esbroufe, fuyant la complaisance, Trahan manie un lexique de la privation pour opposer vérités et contre-vérités, évidences insolubles et vertiges précis articulés par un travail formel irréprochable. Nœud coulant est un livre qui redonne ses lettres de noblesse à la mesure, à la finesse et prouve que l’audace est probante lorsqu’elle privilégie l’art de la touche et des manœuvres justes. Le nombre des influences qui traversent Nœud coulant est vertigineux, comme si l’auteur avait traversé des siècles de poésie, et que l’élucidation cohérente d’un tel corpus ne pouvait mener qu’à ces incarnations finement ciselées, là où le poème remonte sans cesse l’expérience du sens, là où se reprisent les possibles,
« comme tordus par un cœur de terre ». La grande rigueur de ce travail refusant l’effusion, l’ivresse de la parole et le confort lyrique commande l’analyse des acceptations qui ont mené à son aboutissement, suggérant au passage que la pratique de la poésie est un acte de connaissance sensible, la voie privilégiée où s’invente la littérature.

Finaliste du prix Émile Nelligan

Charles Dionne,
D’espoir de mourir maigre,
Les éditions de La Tournure – Coop de solidarité
2013

Étienne Lalonde,
Vivier, Claude,
Les Herbes rouges
2013

Cofondateur de Poème sale, Charles Dionne poursuit actuellement une maîtrise en enseignement. Il a publié son premier recueil de poésie, D’espoir de mourir maigre, en mai 2013 aux éditions de La Tournure.

Commentaire du jury

Parce qu’il est un espace occupé par des voix puissantes, le poème qui s’imprègne des matières de l’urbanité et des imaginaires de la transgression présente une matière dangereuse. À la suite des Vaniers, Desbiens, Yvon et Ginsberg, arriver à proposer une manière personnelle d’aborder cet espace du poème sale demande une rigueur, une connaissance et une lucidité d’écriture peu commune. D’espoir de mourir maigre démontre admirablement qu’il y a de l’espace à la suite des géants, des emplacements où la terre est encore à prendre. Ce livre propose que le salut ne relève pas d’un art du pastiche, mais de la pleine reconnaissance des œuvres en place et de la certitude que la synthèse ne suffit pas. Avec une vive inventivité verbale traversant les malheurs ordinaires pour « rythmer d’inspiration les images muettes », avec ses procédés de répétition et ses réflexes sériels pour saisir le sentiment d’une Amérique, Charles Dionne affirme brillamment son désir de dire le réel immédiat, s’en servant comme espace transitoire afin de le transformer en expérience limite à la fois rude et lumineuse « pour que mourir soit charnel », pour transfigurer les rébellions triviales.

Étienne Lalonde est né à Montréal en 1979. Il a fait paraître six ouvrages, parmi lesquels Histoires naturelles (Prix Félix-Leclerc de la poésie 2011), Devenir vieux et Chemins mal éclairés, tous unanimement salués par la critique. Écrivain en résidence au Studio du Québec à New York en 2012, il représente régulièrement le Québec dans des festivals littéraires internationaux, notamment en Russie, en Inde et au Danemark. En janvier 2014, 21 courtes pièces sur des textes d’Étienne Lalonde, du compositeur André Hamel, remportait le prix de la création de l’année aux 17es Prix Opus du Conseil québécois de la musique.

Commentaire du jury 

Si les livres de poèmes de nature biographiques sont d’une grande rareté, c’est qu’ils présentent l’apparence d’un contre-emploi, comme si la poésie devait démissionner devant la richesse du récit réel. Vivier, Claude donne à voir l’existence d’un homme par un continuum d’expériences aveugles, présentées comme une série d’angles morts où l’indicible et l’infigurable tissent une réalité intime, incarnée dans une sensibilité à la fois profonde, sincère et bouleversante. Avec une maîtrise sidérante, Étienne Lalonde alterne la prose et le vers de manière organique, comme s’il s’agissait d’une histoire naturelle, de l’unique manière de s’approprier la matière dense que représente le distillat du vécu du compositeur Claude Vivier. Sans jamais se laisser écraser par cette matière, Lalonde offre des images claires et nuancées, traversées par l’exigence de l’énigme, sans tomber dans le cryptique; un jeu d’équilibre où « demain ne respire pas », une œuvre riche qui témoigne de la nécessité et de la force du poème. Si le je et le tu du poème sont ceux d’un autre, ceux d’Étienne Lalonde portent un nom et les traces d’une mémoire, celle de Vivier, Claude, dont le portrait sensible prend tout son sens dans l’évocation et la beauté des silences nécessaires.

JURY 2013      COMMUNIQUÉ DE PRESSE

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