Fondation
Émile-Nelligan

Mahigan Lepage

Lauréat du prix Émile-Nelligan

Mahigan Lepage,
Relief,
Le Noroît
2011

 

Né en 1980, Mahigan Lepage a grandi en Gaspésie. Il a étudié la littérature à Montréal et séjourné plusieurs fois en France : fin-2010, il obtient son doctorat en cotutelle de l’Université du Québec à Montréal et de l’Université de Poitiers. Il a publié des livres numériques aux éditions Publie.net (Carnet du Népal, La science des lichens) ainsi que des livres papier aux éditions du Noroît (Relief) et chez Mémoire d’encrier (Vers l’Ouest, Coulées). Son site personnel, Le dernier des Mahigan, se veut un lieu d’exploration de l’écriture et de l’image.

Commentaire du jury, par Benoit Jutras, président.

Proposition atypique dans la production poétique actuelle, Relief court-circuite avec audace et habileté les paramètres du récit au profit d’une écriture travaillée de l’intérieur par le trajet ébranlé et tragique de Romu, figure allégorique confrontée à la sauvagerie indifférente de l’espace boréal. Dans cette prose élégante, serrée, traversée de tronquages et de condensations syntaxiques, le poème nomme le dehors et le cristallise jusqu’à en devenir le prolongement mythique. L’Ascension, Patapédia, Soleil d’Or, Pin rouge : la terre gaspésienne est sans cesse retournée, renversée dans ses vocables, ses évocations, ses matières de langue, tant et si bien qu’elle en vient à se défaire de sa propre réalité pour prendre la forme d’un théâtre occulte où se joue le sort du mouvement et du regard. Maîtrisée, calibrée, élégamment indépendante, la voix du poème porte la mémoire et l’héritage filial comme une équation inquiète, une question qui sourd de cette patiente épopée sans épopée, ce destin du nord transfiguré dont les traits antiques sont rendus dans une langue aussi âpre que sensorielle.

Finaliste du prix Émile Nelligan

Jean-Philippe Bergeron,
Géométrie fantôme,
Poètes de brousse
2011

Marie-Josée Charest,
Le reste du monde,
Les Herbes rouges
2011

Jean-Philippe Bergeron est né en 1978 à St-Hyacinthe. Il a passé sa jeunesse en Gaspésie avant de s’établir à Montréal. Il a publié quatre livres de poésie. Il a remporté le prix Alain-Grandbois en 2004 avec Visages de l’affolement (Lanctôt éditeur). Il a fait paraître ses trois livres suivants aux éditions Poètes de Brousse : Débris des ruches, en 2005, Ombres, en 2007, et Géométrie fantôme en 2011. Ce dernier recueil est accompagné des œuvres du peintre Jean-Sébastien Denis.

Commentaire du jury

S’articulant avec aplomb et singularité autour d’une métaphysique du vertige, Géométrie fantôme nous convie dans un espace en friche
où la parole devient incantation en renversant les codes du logos et l’idée même de représentation. Le poème sonde ainsi le chaos pour
en révéler la précision, la physique érotique, de la même façon qu’il redessine la possibilité organique d’être au monde. Matière archéologique, système d’apparitions et d’effacements, le corps se présente ici comme un prisme d’absolu, un rhizome de sens infini
à partir duquel se réinvente l’identité
d’un je ainsi que son rapport avec une figure féminine spectrale, tous deux soumis à l’expérience limite
d’un deuil aussi agressif qu’impossible. Dans cette architecture poétique où « tous
les éléments du monde forment une fragile nécropole » et qui s’avère en admirable adéquation avec les abstractions sensibles et radicales de Jean-Sébastien Denis, le coefficient d’étonnement est maintenu au plus élevé, la voix se dé-pensant continûment à travers la minutie et la charge sémantique des images qui aggravent la radiance du poème comme d’une réalité dangereuse en équilibre entre le mystère et la clarté.

Marie-Josée Charest est née à Matane et vit à Maria, en Gaspésie. Elle détient un baccalauréat et une maîtrise en études françaises de l’Université de Montréal. Elle a publié Rien que la guerre, c’est tout aux Herbes rouges, recueil qui lui a valu d’être finaliste au Prix du Gouverneur général, au prix Alain-Grandbois ainsi qu’au Prix de poésie Estuaire – Bistrot Leméac. Le reste du monde est son deuxième livre. Elle remporte le Concours de poésie 2012 de la Fondation lavalloise des lettres et collaborera à l’Anthologie poétique francophone de voix féminines contemporaines Pas d’ici, pas d’ailleurs (Voix d’encre, automne 2012).

Commentaire du jury

Le reste du monde s’approche au plus près de ce qui s’efface en investissant le devenir incertain et sans appel d’une multitude silencieuse. Ces êtres anonymes de l’épreuve et de l’exclusion sont ici pris en charge par une voix qui regarde autant qu’elle nomme les nouveaux archétypes vivants de la chute des temps. Évitant l’écueil de l’anecdote ou du misérabilisme, cette voix ne cesse de consentir à l’exigence du constat et de la répétition pour mieux parler la langue fine, matérielle, d’une vérité qui ne se défile plus. La succession à la fois achoppée et insistante des images que charrie cette écriture, le rythme et l’éthique du souffle court : partout la forme réaffirme le travail de reprise du poème qui, à partir des artefacts de la survivance et de la désolation ordinaire, recompose le tissu des apparences pour nous reconduire à l’expérience de la faille et de la résilience. Vaste portrait composite d’une intranquillité qui va jusqu’à mettre en lumière le rapport amoureux dans son inachèvement et son désir de sauvegarde, l’ouvrage de Marie-Josée Charest apparaît comme un mémorial puissant, celui d’un présent qui luit comme il peine.

 

JURY 2011      COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Fondation
Émile-Nelligan

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